Loi C28 : un bilan positif malgré les faiblesses du CRTC
Dans quelques jours, cela fera un an que la Loi canadienne anti-pourriel (Loi C28) est en application au Canada. Le bilan de cette première année montre que les consommateurs y sont très attachés et qu’elle a réduit notablement le volume de pourriels et de messages commerciaux dans nos boîtes aux lettres électroniques. Par contre, le CRTC est pointé du doigt par les entreprises.
Les consommateurs adorent la Loi C28
Lorsque le CRTC a ouvert son centre de notification des pourriels , tous les observateurs s’attendaient à ce qu’il y ait une vague temporaire de plaintes qui retomberait aussi vite que le sujet disparaîtrait de l’actualité. Le 4 juillet, le CRTC annonçait qu’il avait déjà reçu plus de 1,000 plaintes, soit une moyenne de 250 par jour. Depuis la vague s’est transformée en raz de marée, les derniers chiffres rendus publics indiquent qu’au mois de mai dernier, le CRTC avait déjà reçu 310,000 plaintes. Cela représente plus de 1,000 dénonciations par jour depuis l’entrée en vigueur de la Loi C28 !
Voici à quoi ressemble la courbe des dénonciations selon les chiffres du CRTC :
Pour comparaison, la LPRPDE (Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques – PEPIDA en anglais) entrée en vigueur en 2000 génère chaque année une moyenne de 4,000 demandes desquelles 250 sont traitées comme des plaintes formelles. Ce qui signifie que la Loi C28 a généré 5 fois plus de signalements en 10 mois que la LPRPDE en 15 ans ! Cette tendance de fond montre à quel point la population canadienne est attachée à la Loi canadienne antipourriel.
Nos boîtes de courriel désengorgées
Nous sommes tellement habitués à recevoir des tonnes de messages qui ne nous intéressent pas que nous n’y faisons plus attention. Pourtant, comme le rapportait récemment le journal Métro, le volume de courriel dans nos boîtes aux lettres électroniques a baissé de près d’un tiers depuis l’entrée en vigueur de la Loi C28.
C’est ce que démontre CloudMark, un spécialiste international de la sécurité sur Internet, dans son Security Threat Report du 1er trimestre 2015.
La courbe ci-dessous montre clairement l’impact de la Loi C28 sur le volume moyen de courriels reçus par les canadiens.
L’étude précise « Le volume mensuel moyen de courriel reçu par les clients de Cloudmark au Canada a baissé de 29% après la Loi C28. Cette baisse se répartit de façon égale entre les pourriels et les courriels légitimes. »
Comment la Loi C28 peut-elle faire baisser le volume de courriel légitime ?
Parce que le courriel que l’on reçoit se décompose en général en trois catégories :
- Le pourriel au sens traditionnel du terme, c’est à dire les messages illégitimes de vendeurs de médicaments de contrebande, de pilules pour maigrir et de services pour adultes envoyés à des millions de personnes dont les adresses sont obtenues avec des techniques dignes de pirates informatiques.
- Le pourriel au sens de la Loi C28 qui inclue les messages envoyés par une entreprise légitime mais qui ne respectent l’une ou l’autre des nombreuses règles de la Loi canadienne antipourriel.
- Le courriel qu’on attend ou qu’on a demandé à recevoir, le seul légal selon la Loi C28.
Selon Cloudmark, la Loi C28 a fait baisser de près d’un tiers tant le volume de la première catégorie que le volume des deux autres catégories réunies. Comme on reçoit toujours les courriels de nos amis et de nos collègues de travail, il y a fort à parier que la baisse est concentrée sur la deuxième catégorie et soit donc beaucoup plus importante en proportion.
Une réalité que me confirmait récemment David Poellhuber, président de Zerospam, un des leaders canadiens de la protection du courriel qui filtre chaque jour des centaines de milliers de pourriels : « La Loi C28 a eu un impact sur le nombre de messages commerciaux non sollicités reçus au Canada mais pas nécessairement sur le volume de pourriels au sens strict du terme. La plupart de ce pourriel est envoyé à partir d’ordinateurs infectés à l’insu de leur propriétaire et est donc peu sensible aux lois. »
La catastrophe annoncée n’a pas eu lieu
Comme nous l’expliquions dans notre historique de la Loi C28, cela fait maintenant un peu plus de quatre ans et demi que la Loi C28 a été votée par le parlement canadien. Et durant toutes ces années, beaucoup de lobbys ont tenté de la faire déraper en présageant des fermetures d’entreprises et des pertes d’emploi à la pelle. Or, force est de constater qu’un an et 31M$ d’amendes plus tard, aucune entreprise ne semble avoir fermé ses portes à cause de la Loi C28.
L’absence de catastrophe ne veut pas dire que tout va bien pour les entreprises canadiennes qui dénoncent les faiblesses de l’application de la Loi C28 par le CRTC.
Les entreprises mal informées par le CRTC
Une étude menée auprès de plus de 500 entreprises québécoises vient d’être publiée par Cyberimpact, une solution canadienne de marketing courriel qui facilite grandement le respect de la Loi C28. Il ressort que près de deux entreprises sur trois (62,52%) estiment que le CRTC ne fait pas bien son travail de sensibilisation auprès des PME. Ce qui est confirmé par le fait que près de la moitié des entreprises (43,51%) avouent mal connaître la Loi canadienne antipourriel. D’ailleurs, c’est ce manque de connaissance de la Loi C28 qui a poussé de nombreuses entreprises à ruiner des années d’efforts marketing en appliquant une mauvaise approche de conformité.
Une réalité que l’équipe de Certimail constate chaque jour. Parmi les centaines d’entreprises avec lesquelles nous échangeons, la plupart continuent de penser que la Loi canadienne antipourriel ne concerne que les envois en nombre et elles sont surprises d’apprendre que la loi réglemente aussi les messages que les employés de l’entreprise envoient individuellement à leurs contacts dans le cadre de leurs relations commerciales.
Les faiblesses du CRTC nuisent aux entreprises
Même si la Loi C28 a de nombreux défauts, ce sont surtout les faiblesses dans son application que dénoncent les entreprises canadiennes. Alors que le CRTC n’a complété que 4 enquêtes sur les 310,000 plaintes reçues, les entreprises qui ont investi temps et argent pour se conformer se sentent désabusées quand elles constatent l’impunité dont bénéficient ceux qui ne se conforment pas.
D’autre part, même si le CRTC est tenu par la Loi de passer des ententes avec les autorités d’autres pays pour la faire respecter par les entreprises étrangères qui envoient du pourriel au Canada, rien n’a été encore annoncé à ce niveau. D’ailleurs le sondage de Cyberimpact montre que 48% des entreprises estiment que la Loi nuit à leur compétitivité face aux entreprises américaines.
Enfin, selon le sondage de Cyberimpact, 10% des entreprises ont abandonné l’utilisation du courriel à cause du flou de la loi et de leur peur des amendes, ce qui représente une perte d’efficacité pour des milliers d’entreprises.
La Loi C28 améliore le marketing des entreprises
Les entreprises qui ont fait une démarche de conformité à la Loi C28 constatent souvent une amélioration de l’efficacité de leurs campagnes. En effet, la Loi C28, malgré ses nombreux défauts, vise essentiellement à forcer les entreprises à utiliser les meilleures pratiques de communication électronique commerciale ce qui permet de créer une meilleure relation avec la clientèle. Ainsi, le Courrielleur, un autre joueur québécois du marketing par courriel, a constaté que depuis l’entrée en vigueur de la Loi C28, le taux d’ouverture des 20 millions de messages qu’il envoie chaque mois a cessé de diminuer et a même augmenté de 5%.
C’est sur ce principe que fonctionne Certimail dont les recommandations reposent sur les meilleures pratiques plutôt que sur une lecture purement légaliste de la Loi canadienne anti-pourriel. Cela permet à nos clients d’améliorer leur efficacité marketing en même temps qu’ils se protègent des enquêtes et des amendes.
Malgré ses défauts, la Loi C28 est là pour rester
Après quinze ans d’inaction face au déluge de pourriels qui inondait nos boîtes de courriel, le gouvernement a passé une loi qui provoque un engouement surprenant des consommateurs-électeurs et qui donne déjà des résultats importants sur l’engorgement de nos communications électroniques. Il va être difficile de trouver un politicien assez fou pour remettre en cause cette loi. Par contre, de plus en plus d’observateurs estiment que ce bilan positif de la Loi canadienne anti-pourriel a été obtenu malgré le CRTC plutôt que grâce à lui. Une situation qui nuit aux entreprises canadiennes et que les politiciens devraient regarder de plus près.
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