Le parlement a entamé l’examen de la Loi Canadienne anti-pourriel

Le Comité permanent de l’industrie, des sciences et de la technologie de la Chambre des communes a entamé ce matin l’examen de la Loi Canadienne anti-pourriel avec une présentation des responsables du CRTC qui permet d’identifier les principaux sujets de préoccupation des députés et des points sur lesquels leur analyse porte. Même si tout a été fait pour que le public ne soit pas informé du démarrage de ce processus, nos systèmes de veille ont bien fonctionné et nous avons pu divulguer la nouvelle sur nos réseaux sociaux dès hier.

Une discrétion inquiétante

Tenant compte qu’il s’agit d’une des lois qui générent le plus de plaintes de la part des consommateurs et qu’elle est décriée et remise en cause activement depuis des années par les de nombreux lobbys depuis son adoption il y a plus de 7 ans, il est surprenant que le démarrage du processus d’examen n’ait pas été annoncé publiquement.

En fait le seul endroit où l’information a été divulguée c’est sur l’agenda du Comité qui n’est généralement suivi que par les lobbyistes professionnels. Pourtant vu l’importance de cette loi, on aurait pu s’attendre à ce que le début du processus soit annoncé publiquement pour permettre aux organismes concernés de se préparer pour alimenter la réflexion du Comité.

On est en droit de se demander ce que cache cette discrétion.

Le ministère et le CRTC ouvrent le bal

La première session a été consacrée à l’audition des responsables du ministère, Mark Schaan, directeur général des politiques-cadres du marché, et Charles Taillefer, directeur du Secteur du service de transformation numérique à la Direction de la politique sur la vie privée et la protection des données, ainsi que des responsables du CRTCSteven Harroun, chef de l’application de la conformité et des enquêtes au CRTC ainsi que ses collègues Neil Barrat, directeur, Conformité et enquêtes et Kelly-Ann Smith, conseillère juridique principale.

Dans son allocutation, monsieur Schaan a fait un rapide historique de la Loi. Il a mis de l’avant son efficacité constatée alors que le pourriel a été réduit de plus d’un tiers au Canada et a ensuite expliqué l’importance de cette loi pour le développement des affaires électroniques au Canada.

La parole a été ensuite donnée au CRTC. Dans son allocution, monsieur Harroun a fait un rappel des différents outils d’applications de la Loi Canadienne anti-pourriel qui vont de la lettre d’avertissement aux sanction pécuniaires administratives en passant par les avis de violation et les engagements. Il a ensuite insisté sur les efforts d’éducation et de sensibilisation du public et surtout des entreprises, mettant de l’avant les 6 conférences données à Toronto au mois de mai dernier qui ont permis de rejoindre 1 200 entreprises. Un député lui a d’ailleurs rappelé que le Canada ne se limitait pas à Toronto. Enfin il a expliqué le travail réalisé par le CRTC au niveau international pour développer des ententes de collaboration avec les autorités de plusieurs pays.

L’évolution des demandes

Lors de sa réponse à la première question du Comité, monsieur Harroun a mis de l’avant que les demandes d’information que le CRTC reçoit des entreprises concerne de plus en plus la mise en place de programmes de conformité alors qu’en 2014, les questions portaient plutôt sur la notion de consentement et de lien de désabonnements. Il a également insisté sur l’efficacité des différents formes de pénalités qu’ils peuvent imposer aux entreprises.

L’enjeu du droit de recours civil

On se rappelle que le ministre Bains avait annoncé le 7 juin dernier qu’il suspendait temporairement l’application du droit de recours civils et collectifs qui devait commencer le 1er juillet 2017 en attendant l’examen parlementaire de la Loi. Il est donc normal que la mise en oeuvre de ce droit de recours fasse l’objet de plusieurs questions des membre du comité. Ces questions ont permis à monsieur Schaan d’expliquer pourquoi le ministère avait décidé de suspendre le droit de recours civil.

Il a notamment expliqué que les principales raisons sont le risque de voir se multiplier de très couteux recours collectifs ainsi que le fait qu’il existe encore de nombreuses zones grises dans ce qui est conforme ou pas.

De son côté, le CRTC a insisté sur le fait le droit de recours civil est un outil important pour faire appliquer la Loi C28 et que des mesures similaires au droit de recours civil sont présentes dans les législations de plusieurs pays, notamment les États-Unis, l’Australie et le Royaume-Uni.

Déjà plus d’1,1 M de plaintes enregistrées

Monsieur Barrat a indiqué que le CRTC a déjà enregistré plus d’1,1 million de plaintes dans le centre de notification des pourriels qui est la principale source utilisée pour les enquêtes. Les plaintes continuent d’ailleurs d’entrer à un rythme de 5 000 par semaine ! Il a également rappelé que les plaintes touchent toutes les industries et toutes les tailles d’entreprises incluant le secteur des organismes sans but lucratif.

La Loi C 28 est efficace

Monsieur Schaan a fait état de rapports indépendants qui démontrent l’efficacité de la Loi Canadienne anti-pourriel. Il a cité un rapport américain montrant qu’un an après l’entrèe en vigueur de la Loi, le nombre de courriel reçu par les canadiens a diminué de 29% et le volume de pourriels en provenance du Canada a baissé de 37%. Il a également cité une étude réalisé par Ipsos pour le compte de l’ACEI montrant que dès octobre 2014, 62% des canadiens connaissaient la Loi C28 et croient dans son efficacité. D’ailleurs 84% d’entre eux en avaient déjà profité pour réduire le volume de messages commerciaux qu’ils recevaient. De leur côté, 49% des entreprises estiment que la Loi Canadienne anti-pourriel n’a pas eu d’impact sur leur marketing, 23% estime que l’impact a été minime et 27% déclarent avoir subi un impact significatif.

Monsieur Schaan a rappelé que le Canada faisait partie des 5 pays générant le plus de pourriels avant l’adoption de la Loi C 28 et qu’il ne fait même plus partie du top 10 depuis que la Loi est en vigueur.

La GRC appelée à l’aide

Dans une question portant sur les moyens mis en oeuvre pour gérer la dimension interntionale du pourriel arrivant au Canada, le CRTC a expliqué que les ententes de collaboration avec les autorités d’autres pays se multipliaient et qu’il n’y avait pas de difficulté particulière à ce niveau. Par contre, il a souligné qu’il ne bénéficiait pas d’une telle collaboration localement, notamment avec la GRC et il a indiqué qu’une telle collaboration  serait bénéfique pour faire respecter la Loi C 28.

Plus de 30 enquête complétées

Le CRTC a indiqué que durant la période de grâce, il a complété plus de 30 enquêtes dont seulement 6 ont été rendues publiques à ce jour. Les autres en sont encore à l’étape de la négociation des engagements avec les entreprises qui collaborent. Certaines des plaintes reçues au centre de notification des pourriels sont partagées avec la GRC pour qu’une enquête criminelle puisse être menée.

La Loi C 28 devient un modèle

Les témoins ont indiqué que la notion de consentement telle que définie dans la Loi Canadienne anti-pourriel inspire la révision en cours de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques mené actuellement par le Commissaire à la vie privée.

De leurs côtés les députés ont fait de nombreux parallèles entre les Régles sur la liste nationale de numéros de téléphones exclus qui est gérée par la même équipe du CRTC et qui génère plus de cent enquêtes par an pour deux fois moins de plaintes que la Loi C28.

Le CRTC est faché avec les chiffres

Un fait curieux à noter est qu’à chaque question portant sur des chiffres liés aux plaintes ou aux enquêtes, le CRTC était incapable de répondre. Ce fut également le cas quand on leur a demandé les secteurs industriels qui généraient le plus de plaintes, le nombre d’enquêtes et d’amendes ainsi que les différents types de plaintes reçues.

Quand l’Honorable Maxime Bernier a demandé quel était l’impact financier pour les entreprises de se mettre en conformité, le CRTC n’était toujours pas capable de donner des chiffres même estimatifs.

Voilà dans les grandes lignes ce qui s’est dit ce matin. Vous pouvez écouter l’enregistrement des échanges sur le site du comité en attendant que leur transcription soit publiée. De notre côté, nous sommes en train de faire les démarches pour obtenir les dates et participants des prochaines sessions ainsi que pour participer aux débats afin d’y exposer le point de vue basé sur les dizaines de PME québécoises que nous avons déjà aidé à se conformer.

 

 

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